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19/03/2019

Quand Macronien rime avec Beveridgien, c’est un choix de société

Les négociations entre patronats et syndicats concernant l’assurance chômage n’ont pas abouti.

L’UNÉDIC est gérée de manière paritaire par les partenaires sociaux, mais c’est l’Etat qui décide de l’essentiel, comme par exemple, la fusion entre les ASSEDIC et Pôle Emploi, voire du remplacement des cotisations sociales par la CSG, impôt sur lequel le gouvernement a totalement la main. De plus, les négociateurs doivent respecter une lettre de cadrage dictée par le gouvernement. C’est le paritarisme encadré ou tenu en laisse.

Car cette lettre de cadrage est l’exemple même d’injonctions contradictoires que le gouvernement ne pourra pas plus satisfaire par décrets que les partenaires sociaux n’ont pu le faire par accord.
Que dit cette lettre? Créer un système de bonus-malus pénalisant les entreprises multipliant les contrats courts qui ont explosé ces dernières années et décider de mesures permettant 3 à 3,9 milliards d’économies sur un déficit de 10 milliards.
Comme les employeurs ne voulaient pas négocier le moindre bonus-malus et que les syndicats ne voulaient pas baisser les indemnités des chômeurs, la négociation était impossible.
Rappelons les chiffres: 80% des salariés ayant eu un contrat de un mois ou moins sont réembauchés dans la même entreprise, soit 400 000 salariés. C’est le contrat précaire à répétition.

Mais l’enjeu dépasse l’indemnisation du chômage. Les syndicats redoutent, comme le dit Yves VEYRIER, leader de FO, la tentation gouvernementale d’instaurer pour la protection sociale un système beveridgien où les prestations de base seraient financées uniquement par l’impôt et décidées par le seul Etat. Système emblématique des politiques anglo-saxonnes contrairement au système bismarckien marqueur social de l’Europe du nord et du sud. Entre la logique assurancielle actuelle et la logique assistancielle c’est un projet de société qui est en jeu. Le gouvernement doit assumer son choix et l’expliciter.

La « gouvernance » est aussi au cœur des malentendus entre le gouvernement et les corps intermédiaires. Prenons le cas de la future réforme des retraites, qui sera chargé de la gestion du futur régime unique? Les partenaires sociaux ont si bien géré les régimes de retraites complémentaires qu’ils ont accumulé un fonds de réserve de 118 Milliards d’euros, fonds de réserve indispensable pour le futur régime proposé par Monsieur DELEVOYE. La crainte est grande de voir le gouvernement faire main basse sur ces fonds paritaires tout en retirant les partenaires sociaux de la gestion du futur régime.

Réduire l’indemnisation des cadres illustre aussi ce changement de système, si les cadres cotisent comme les autres salariés pourquoi auraient ils moins d’allocations? Différences entre assurance et prestation sociale... quand on vous dit que cette nouvelle majorité a peu de culture sociale.

24/02/2019

Contribution au grand débat

Pour améliorer durablement le pouvoir d’achat il faut renégocier la globalité des politiques salariales.

Le budget de l’Etat mis en otage par les gilets anti taxes et impôts ne permettra pas de répondre par la loi à la question légitime du pouvoir d’achat, il faudra passer par la case négociation avec les employeurs publics et privés. Mais il faudrait, déjà, que le gouvernement et le patronat comprennent que sans le premier syndicat , la CFDT, uni remarquablement avec la CFTC et l’UNSA, eux mêmes en relation constante avec les associations de lutte contre la pauvreté, rien ne sera possible pour bâtir un nouveau contrat social. La réunion d’un Grenelle du « pouvoir de vivre » est urgent pour alléger notamment les dépenses contraintes: logement, transport, énergie qui représentent 60% des revenus des bas salaires et de 30 à 40% des revenus des classes dites moyennes.

Dans les entreprises une négociation annuelle obligatoire sur « le pouvoir de vivre », si non accord, indexation minimum des salaires sur l’indice des prix.

Plusieurs études montrent que si l’on reste plus d’un an au SMIC, on risque d’y rester longtemps, voire toutes sa carrière, or le SMIC devrait être un salaire d’entrée dans l’emploi. Il faut donc renégocier les grilles des conventions collectives pour « aérer » les échelons du bas de grille trop resserrés vers le SMIC.

Négociation d’un système limitant les trop grands écarts dans les augmentations annuelles entre les cadres dirigeants et les autres collaborateurs ( en 2018, les dirigeants du CAC 40 ont augmenté leurs rémunérations de 14% contre 1,9% pour les salariés).

Création d’un guichet d’informations salariales où il serait possible d’obtenir toutes les grilles de salaires par branche professionnelle et l’accès au registre national des accords d’entreprises; non application des barèmes prud’homaux si non application des grilles dans les 6 mois qui suivent une mise en demeure.


Retrait de la part réservée aux augmentations individuelles dans les négociations salariales. Les augmentations individuelles relèvent de la seule décision patronale, pourquoi y associer les syndicats?.

Négociation dans les entreprises pour abonder toutes primes accordées par les collectivités comme la prime transport du Conseil Régional, les aides au covoiturage, à l’apprentissage ou au permis de conduire, etc...

Retraités:
- Revenir immédiatement sur la non indexation des retraites sur les prix.
- Paiement des retraites en fin du mois concerné et non le 9 du mois suivant.
- Cotisations retraite au taux employeur pour les plateformes de réservation en ligne comme Uber.

Hauts de France: organisation d’une conférence annuelle de tous les acteurs concernés pour rattraper en 10 ans le retard régional de rémunération.

Discrimination Hommes/Femmes : moins de 40% des entreprises concernées par la loi de 1972 ont signé un accord ou un plan d’égalité professionnelle. L’inspection du travail doit « retoquer » tous les accords sans calendrier et objectifs précis. Obligation de rattraper tous les salaires féminins en 5 ans sur celui d’une même cohorte de salariés masculins.

Droits de succession: l’argent des héritages doit profiter aux générations d’actifs et non à des retraités. Il est proposé d’exonérer les dons aux petits enfants et de taxer plus fortement les successions qui ne profitent pas aux investissements économiques.

Obligation pour toutes les entreprises d’accueillir des jeunes en formation pour des stages d’immersion rémunérés partiellement. Il y en a marre de voir les entreprises critiquer l’éducation nationale de son manque de connaissance de l’entreprise et voir tant de jeunes à qui l’on refuse un stage sans même répondre à leur courrier.

Mise en place dans les CESER d’un observatoire permanent des inégalités.

17:38 Publié dans Actualités | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : grand débat

06/02/2019

Pouvoir d’achat: l’Etat ne peut pas tout, les employeurs vont devoir sortir les billets.

La première « doléance », comme ils disent, est celle du pouvoir d’achat.
Qu’elle arrive largement en tête est logique, légitime et non démagogique.
Tous les syndicats l’ont dit et personne ne les écoutait, les Politiques de la région, X BERTRAND et G DARMANIN répètent à l’envi qu’il y a un problème de pouvoir d’achat très important notamment pour les classes intermédiaires, il n’est donc pas surprenant de retrouver cette revendication en haut de la liste. La consommation des ménages n’avait progressé en 2018 que de 0,8% contre 1,1% en 2017, preuve, s’il en est besoin, des difficultés matérielles de nombreux ménages.
Dans les Hauts de France, le revenu déclaré médian, avant impôts et redistribution est le plus faible de France métropolitaine. Il atteint 18 200 euros contre 20 100 au niveau national ( un treizième mois de différence), bien loin des 19 900 en Provence Alpes-Côtes d’Azur et les 20 600 d’Auvergne -Rhône-Alpes. Constat qui justifierait une négociation régionale d’un calendrier de rattrapage.

Ces dernières années l’emploi était l’objectif privilégié par tous les acteurs. Le coût du travail était pointé comme la principale cause du chômage et cela conduisait à limiter les revalorisations salariales.

L’inflation, ce trop vieil indicateur des négociations salariales, est devenue, certains mois, égale à zéro. Les employeurs ont usé et abusé de cet indice des prix soit disant imparable.

Et disons le, les pleurnicheries de nombreux employeurs, toujours critiques sur la productivité de leurs employés et se lamentant sur les charges tout en préservant leur train de vie, n’a rien arrangé.Lorsque ces derniers mois, nous disions, comme consultants, aux DG: « et si..., vous vous proposiez ces augmentations pour vous mêmes, les accepteriez vous? » à leur regard choqué nous avions du mal à leur faire comprendre que les délégués syndicaux les refuseraient eux aussi.


Si l’on en est arrivé là, c’est aussi parce que, ce qui est une banale question de fin de mois, a été , au fil du temps, trop technicisée avec l’explosion de la part variable des salaires. Le concept des 3 parts d’ augmentations: les « augmentations générales » réduites à une peau de chagrin, souvent moins de 0,5% par an; les « augmentations individuelles » boostées par l’individualisation et la rémunération au mérite, représentant souvent en masse le triple des augmentations générales; et enfin, les augmentations par les primes, chèques déjeuner ou autres, épargne salariale ou retraite, permettant d’échapper à une partie des prélèvements comme sur les heures supplémentaires. Avec l’euphorie de cette rémunération dite globale, bien des observateurs s’inquiétaient du manque de lisibilité et d’équité des politiques salariales. Ce qui ne se voit et ne se lit pas, n’existe pas.

La question du SMIC est aussi un peu trop systématiquement vue comme responsable du coût du travail, elle a conduit à des exonérations de charge d’abord au niveau du SMIC, puis à 1,3, 1,6 et demain?. Le coût du travail est réel pour les travailleurs peu formés, en concurrence directe avec les salariés des pays émergents mais ce n’est pas le cas de tous les secteurs comme celui de la restauration par exemple, où les patrons ont menti lors de la baisse de la TVA à 5% qui devait aller notamment à l’augmentation des salaires. Les élus ont été bernés, il est temps de remettre à plat la pertinence de toutes ces exonérations. Il est quand même édifiant de voire la revendication du SMIC réglée aujourd’hui par l’incompréhensible prime d’activité !!

10% des salariés sont aujourd’hui payés au SMIC soit autour de 1500€ mais les réductions dégressives de charges vont jusqu’à 2400€! Ces exonérations ont coûté en 2016: 27,8 milliards d’euros soit 8,5% des cotisations payées à l’URSSAF. Cela s’appelle faire financer du salaire par les impôts et taxes ( impôts et taxes rejetés par les gilets jaunes...)

Dans le grand débat, les questions posées par le gouvernement ne concernent pas le salaire proprement dit mais uniquement les primes de transport, de chauffage. Les patrons ne seraient-ils pas concernés par l’austérité salariale? Quand nous négocions notre salaire c’est avec notre employeur et non avec le ministre, espérons que le débat remettra les pendules à l’heure.

Je crains fort que très rapidement les employeurs face à des salariés en gilets jaunes regrettent les chasubles oranges ou rouges. Chez ARC, si ce sont les salariés non organisés qui ont fait plier la direction, ce sont les six syndicats qui ont signés un accord permettant de trouver neuf millions d’économie sur le coût du travail! Merci les syndicats. Merci les ringards. Merci les courageux.

Terminons par une bonne note, ce gouvernement tant décrié a quand même versé près de 12 milliards aux ménages ce qui fera un gain moyen de 440 euros par foyer. Ce n’est pas rien.