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04/04/2018

La fin ne justifie pas les moyens.


Que penser du conflit des cheminots ?

Impossible de répondre à cette question sans se référer aux fondamentaux sur lesquels chacun « fonde » sa réflexion. Eh bien, la réponse est complexe et mérite un peu de mesure.

Le droit de grève et la liberté syndicale sont des droits intangibles qui ne peuvent être remis en cause, cheminots-CGT-SUD ou pas. Il n’est, déjà, pas superflu de le rappeler à tous les va-t-en-guerre.

L’intérêt général peut être porté aussi par les syndicats comme l’affirment les syndicats réformistes. Intérêts général et professionnel s’opposent souvent et ce conflit en est l’exemple. L’histoire nous l’a appris, la résolution d’un tel conflit d’intérêts ne peut se faire que par la négociation, à condition de prendre en compte les deux intérêts : général et catégoriel. Jamais facile.
Le droit de se déplacer, de travailler, est tout aussi constitutionnel que le droit de grève. La liberté des uns s’arrête quand elle entrave celle des autres. Les syndicalistes responsables le savent, c’est Laurent BERGER qui déclare « je ne veux pas d’un conflit dur » mais il veut négocier « les conditions sociales ».
Nous ne sommes plus en 1995 où est né le concept de « grève par procuration », cette folle illusion qui voudrait que les cheminots, investis de je ne sais quelle mission, feraient grève pour vous et moi. Avant, quand la grève était encore utile, on la faisait pour gêner les patrons, pas les salariés. Et je ne donne à personne le droit de faire grève pour moi !
L’objet du conflit est légitime, l’ouverture à la concurrence exige la négociation de nouvelles conditions sociales. Mais tous les syndicats ne sont pas unis sur les mêmes objectifs, la CGT et SUD refusent cette ouverture quand l’UNSA et la CFDT en ont « pris acte ».

La fin ne justifie pas les moyens, m’apprenait-on dans mon école... syndicale. Les moyens d’actions utilisés ici sont particulièrement violents. Violents pour les familles, les lycéens et étudiants, les salariés, ce sont des millions de citoyens qui utilisent le train pour apprendre et travailler. Je pense à ce jeune, que l’on aide à raccrocher le travail, incapable de rejoindre son lieu de stage qu’il a eu tant de mal à décrocher.

Mais l’insupportable est de voir cette ouvrière obligée de faire des courbettes devant son chef pour obtenir quelques aménagements d’horaire et d’entendre « tu me le rendras le moment venu » ! Insupportable, le rapport de force des uns affaiblit celui des autres… des plus faibles.

Pas d’accord.

12/03/2018

Les corps intermédiaires, l’angle mort du réformisme macronien.

Dans la même semaine, Véronique DESCACQ, secrétaire générale adjointe de la CFDT, déclare : « Les « big bangs » et autres coups de pied dans le « système » ne sont que communication politique. Méfions-nous d’un Etat qui pourrait seul tout savoir et tout faire ». Pierre GATTAZ, patron du MEDEF, regrette dans le JDD le manque de discussions sur la formation professionnelle avec le gouvernement. Les tensions entre les partenaires sociaux et le gouvernement étaient telles que les syndicats réformistes avaient conditionné leur signature de l’accord à un engagement préalable du gouvernement de respecter l’équilibre de la négociation.

Avec MACRON, il n’y a pas de partage des responsabilités, les corps intermédiaires sont toujours consultés mais le gouvernement décide seul et de tout. C’est l’héritage culturel de notre pays où après la révolution de 1789 les corps intermédiaires ont été interdits, contrairement aux autres puissances européennes. Il nous aura fallu un siècle pour qu’une loi autorise les syndicats en 1884 et les associations 1910. Cette culture de la primauté étatique n’est plus adaptée (si elle le fut un jour) à la gouvernance d’une société moderne, non pyramidale et plus transversale. La culture européenne repose majoritairement sur 2 piliers indissociables de la démocratie : la démocratie politique imbriquée avec la démocratie sociale. Les « modèles » allemands et nordiques respectent cet équilibre entre la loi et la négociation collective, ils ont fait leurs preuves en témoignent les statistiques sociales.

Nul n’ignore plus que MACRON a un angle mort avec les corps intermédiaires, qu’il considère comme ringards, corporatistes, déconnectés. La volonté dite infaillible de faire tout ce qui a été promis dans la campagne électorale est évidemment une impérieuse obligation pour redorer le Politique, comme l’urgence de débloquer la société.
Nous n’oublierons jamais dans cette région ce que l’on doit aux politiques qui nous ont préservés de l’extrême droite. Notre critique est donc constructive.

Les carences des partenaires sociaux sont réelles. Il y a par exemple 70 000 défaillances d’entreprises par an et personne ne s’était soucié de l’indemnisation chômage de ces entrepreneurs, le patronat arque bouté sur le refus de toute cotisation au nom d’un libéralisme idéologique et les syndicats sur une vision non renouvelée du salariat… MACRON, lui, y répond.
Les futures assises régionales sur le dialogue social organisées par le Conseil Régional sont vraiment nécessaires.

09/03/2018

Sans intérêt général, pas de démocratie.

Dure dure cette période pour les militants de l’intérêt général. La décision concernant Notre Dame des Landes nous appelle à réfléchir au concept d’intérêt général.

Comme la société le syndicalisme a toujours été divisé sur la défense de l’intérêt général. Force ouvrière considère que son rôle est de défendre les intérêts individuels et professionnels, défendre l’intérêt général c’est le rôle du politique. Pour la CGT, proche de la culture des corporations comme la défense des cheminots, des ouvriers imprimeurs, des dockers, les intérêts corporatifs ne s’opposent pas à l’intérêt général. Pour SUD, le travailleur a toujours raison, l’intérêt général est un concept qui aliène. La CFDT et la CFTC se démarquent radicalement des autres syndicats en faisant de la défense de l’intérêt général, un marqueur de leur identité syndicale, un combat difficile à assumer.

Nous voyons avec ce rapide aperçu que la notion d’intérêt général ne va pas de soi. Pour moi l’intérêt général est en recul.
Les rythmes scolaires sont ceux des enseignants et des parents qui ne travaillent pas le week-end, peu importe que nos enfants soient très fatigués et en retard scolaire dans les stats européennes. L’intérêt de l’enfant est blaqueboulé pour les intérêts des adultes !
Les déserts médicaux sont des attentats permanents à l’intérêt général de la santé. Les médecins libéraux refusent toute régulation contraignante de l’installation des médecins au nom des libertés individuelles, bien sûr.

Le financement des maisons de retraite et des Ehpads n’a toujours pas été résolu mettant des personnes âgées et leurs familles dans des situations insupportables. Combien de citoyens se disant choqués sont d’accord pour financer par l’impôt une vraie prestation autonomie ? A chacun de se débrouiller avec ses vieux parents.

Les victimes des inondations se retournent vers l’Etat. Les permis de construire accordés en zone inondable répondaient à des intérêts particuliers et maintenant -comme toujours devant l’accident- nous en appelons à l’intérêt général.
Nous pouvons encore citer : le débat sur la vaccination obligatoire, la limitation de vitesse, le péage urbain, l’installation des antennes relais… à chaque fois le législateur est confronté aux résistances individuelles qui s’opposent aux intérêts collectifs. Contaminer ses collègues, provoquer un accident, participer à la trombose urbaine… est ce à mettre en balance avec la liberté de faire ce que l’on veut ?

L’individualisme, l’égoïsme et tous les « quant à moi » abiment nos sociétés, ne les laissons pas prospérer. C’est un combat militant.