19/10/2012
LE RETOURNEMENT DEMOGRAPHIQUE, UN ENJEU OUBLIE FACE A LA CRISE ? (2)
Par Bernard Quintreau (membre honoraire du Conseil Economique, Social et Environnemental)
Dans le précédent article, nous relevions que 4 problèmes avaient été mal pris en compte lors des années d’abondance démographique.
Voici quelques réflexions pour résoudre ces 4 problèmes.
-Celui de l’insertion des jeunes : les départs anticipés, malgré les intentions affichées, n’ont rien résolu dans ce domaine, et la multiplication des mesures, parfois indispensables pour les plus en difficulté, a contribué à les enfermer dans une stigmatisation certaine : je suis jeune, donc forcément non productif sans aide financière…Les départs nombreux en retraite peuvent faciliter leur embauche, à condition que soient améliorés les processus d’orientation et de formation initiale, en développant notamment l’alternance.
-Celui des conditions de travail et de leur adaptation au vieillissement : le fait de s’appuyer jusqu’à présent sur la « middle class » démographique a évité que l’on se pose la question. Quand le salarié ne pouvait plus s’adapter à ces conditions, c’était à lui de partir…Globalement , les entreprises n’ont pas permis aux salariés de gérer leur vieillissement au travail. Qui plus est, elles ont externalisé ces questions de vieillissement, prises en charge par l’Etat, l’UNEDIC ou l’Assurance maladie. L’augmentation rapide du nombre des « quinquas » et la raréfaction de la population jeune va obliger les employeurs à prendre cette question à bras-le-corps.
-Celui de la formation : la formation tout au long de la vie, priorité européenne, ne reste encore qu’un objectif. Les réactions négatives, le stress face aux changements du travail sont souvent dus à une insuffisance de formation, et fréquemment dès la quarantaine, moment où la formation initiale devient trop éloignée et où l’investissement en formation continue s’effondre. Le retour sur investissement étant de plus en plus court, il n’y a plus aucune raison de ne pas former les salariés dits âgés, y compris en fin de carrière. Entre le coût, préventif, de la formation et celui des conséquences d’une baisse de productivité, le choix devrait être simple.
-Celui des relations intergénérationnelles : avec une seule génération au travail, partageant à peu près les mêmes valeurs et la même culture, le problème ne se posait pas. Les plus jeunes ou les plus anciens, titulaires de contrats atypiques ou sur le départ, avec un pied en dehors de l’entreprise, ne participaient pas vraiment aux collectifs de travail. L’élargissement prévisible du spectre des générations, dont les rapports au travail sont souvent très différents, devrait amener les entreprises à s’appuyer sur leur complémentarité. C'est tout l'enjeu du futur contrat de générations.
Ces questions, dont la liste est loin d’être limitative, montrent que l' emploi de qualité, seule réponse aux enjeux du retournement démographique, ne concerne pas que le seul maintien des seniors dans l’emploi. Au-delà de son intérêt majeur pour l’avenir de la France et de l’Europe, la question des âges présente au moins deux avantages :
-les réponses ne pourront pas être simplistes : ouvrir ce dossier, à tous les niveaux, c’est modifier considérablement le rapport au travail pour tous les salariés ;
-elles ne pourront pas être unilatérales. Elles nécessitent forcément un dialogue, une concertation, et les relations sociales, souvent très mal en point, ont tout à y gagner.
Cette approche concertée nécessite la déclinaison et la conciliation de trois thèmes : l’emploi, le temps et l’espace. Nous déclinerons ces thèmes dans le prochain article.
01:59 Publié dans emploi, jeunes, Retraite, Solidarités intergénérationnelles, Travail | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bernard quintreau
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