140247

21/02/2010

Seniors : après les accords

Quels enseignements peut-on tirer de la négociation sur "l'emploi des seniors" ? Quels sont les principaux impacts ?


Tout d'abord il est certain que, dans beaucoup d'entreprises, Directions comme Organisations syndicales ont découvert qu'il est possible de négocier sur d'autres thèmes que les salaires, l'organisation et les conditions de travail. Si dans les grands groupes internationaux on a depuis de nombreuses années négocié sur des thèmes assez larges, ce n'est pas le cas dans les autres entreprises où la NAO, l'aménagement du temps de travail ou le régime de prévoyance sont les sujets principaux. Dans la négociation sur les seniors il n'y a rien à gagner ni rien à perdre (en temps, en argent). Et ces thèmes de négociation plus complexes et beaucoup moins "concrets" se multiplient : handicap, diversité, risques psychosociaux…

Par ailleurs, constatant que la négociation interprofessionnelle (l'ANI date de 2005) ne conduisait pas à de vrais engagements même dans les Branches, le gouvernement a beaucoup encadré cette négociation sur les seniors. A tel point qu'en obligeant à des indicateurs chiffrés en matière de recrutement des salariés âgés de plus de 55 ans, l'état va obliger les entreprises à s'expliquer de manière très précise sur leurs politiques de recrutement. De nombreux DRH sont un peu soucieux de devoir maintenant s'expliquer sur une politique qui était un de leur dernier "pré carré".

D'autres Responsables RH sont parfois découragés devant le travail qui reste à faire après la négociation (ou la rédaction d'un plan). Il leur faut maintenant mettre en place de réels dispositifs pour assurer la transition entre activité et retraite. Bien entendu les préretraites progressives existaient mais elles s'étalaient sur une durée relativement courte. Il faut maintenant assurer de longs processus qui peuvent s'étaler sur 8 à 10 ans voire jusqu'à 15 années.

Comment garantir, par exemple, l'accès au temps partiel des seniors dans une entreprise où, le plus souvent, les femmes avec enfants étaient naturellement prioritaires ?

Comment permettre aux salariés de plus de 55 ans de concilier vie professionnelle et vie personnelle, a fortiori si leurs conjoints sont, eux, à la retraite ?

Comment organiser véritablement le tutorat des plus anciens vers les plus jeunes, mesure bien souvent reprise dans les entreprises industrielles, alors qu'il n'est pas rare de voir les jeunes salariés s'approprier certains outils bien plus vite que leurs aînés ?

Comment organiser le recrutement de seniors par de jeunes managers ?

Beaucoup d'interrogations et de nouveaux projets confiés à des DRH déjà souvent très occupés au quotidien.

Enfin un autre impact, à moyen terme, préoccupe déjà certaines Directions : la cohabitation intergénérationnelle. Cette dernière va s'accentuer au fil des années, dans un contexte économique qui ne sera vraisemblablement pas celui du plein emploi. Elargir la plage des recrutements aux jeunes et aux seniors oblige à réfléchir à de nouvelles relations entre des générations n’ayant pas les mêmes relations aux valeurs du travail. Quelles vont être les revendications des plus jeunes (et de certains Représentants du personnel) s'ils restent cantonnés à des fonctions subalternes parce que la "place est prise" – pendant longtemps – par un senior ? Et, a contrario, quelles seront les réactions des plus anciens s'ils se sentent "poussés dehors" par des collègues de travail ?

Cette cohabitation imposée et assez nouvelle devra sans doute être prise en compte dans les projets RH à venir.



article écrit en collaboration avec
Antoine Werner
Pactes Conseil

15:10 Publié dans Seniors | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ani, concilier

Les commentaires sont fermés.