23/11/2011
Oser la richesse ? Non, osons gouverner !
Je suis un militant actif et convaincu du World Forum de l'Economie Responsable mais je ne suis pas un fan de la formule "Osez la richesse", même si je comprends son côté provocateur et le sens que lui donnent mes amis organisateurs.
Colloquer sur la richesse quand partout dans le monde les décideurs nous proposent des plans d'austérité à répétition, des plans qui cassent la production de richesses, je trouve cela un peu démagogique.
Nos dirigeants sont si mal à l'aise qu'ils pinaillent sur les mots et inventent "l'austérité juste" comme si l'austérité pouvait être juste, sûrement pas pour un travailleur pauvre quand il se voit réduire la revalorisation de ses allocations familiales.
Attention à la mode cynique des slogans de communicants (qui ne nous vendent que des mots, que des belles formules marketing), comme le "travailler plus pour gagner plus" basé sur une promesse d'heures supplémentaires défiscalisées alors que le chômage explose et que les jeunes de mon quartier ne trouvent même pas un stage gratuit en entreprise. Que vaut ce slogan quand nous sommes passés si près d'une décision pour un nouveau jour de "travail gratuit"... nous sommes très loin du travailler plus et à des années lumières du gagner plus !
Le dernier effet d'annonce sur la prime dividende est éclairant. Face à une opinion publique médusée et révoltée devant l'avalanche d'informations sur les profits des entreprises du CAC40 et le montant exorbitant de certains dividendes, le gouvernement reprend le discours offensif du Président de la République sur le partage des richesses en trois tiers (en oubliant au passage le quatrième tiers, celui de l’Etat !) et promet une prime de partage des profits qu'il fixe à 1200€. Les négociations ouvertes dans certaines entreprises se sont terminées ce 31 octobre par un retentissant échec. D’après la CFDT, la majorité des entreprises ont accordé en moyenne le quart de la somme annoncée. Certaines entreprises comme Sécuritas ont même osé proposer une prime "dividende" de 3,50€ par salarié !
Après ce triste épisode, comment peut-on encore parler de répartition équitable des richesses produites. Personnellement, j'aimerais que les entreprises ayant participé au Congrès Mondial de l'Economie Responsable de Lille affichent le montant de la répartition de leurs profits, le montant des dividendes distribués et celui de la prime du même nom. Car c'est preuves à l'appui que dorénavant nous devons aborder la question de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) et des Investissements Socialement Responsables. Je suis un militant de la RSE et je me bats pour que VIGEO, l'agence européenne de notation des Investissements Socialement Responsables, audite les portefeuilles de nos caisses de retraite, de sécurité sociale ou nos collectivités territoriales car je trouve qu'il y a ISR et ISR ! J’aimerai aussi que les formations et audits dispensés par Alliances soient systématiquement proposés par les comités d’entreprise. En France, il existe 3 labels ISR... preuve que les définitions sont encore loin d'être partagées, preuve que le combat pour l’entreprise socialement responsable est encore loin d’être gagné.
La crise est pourtant bien réelle, la dette n’est pas virtuelle, les déficits accumulés tout au long de ma génération sont le résultat de notre irresponsabilité, de notre refus de réformer notre société. Et ça continue, alors que le dernier plan d’austérité n’est qu’un empilage de petites économies aucune réforme ne nous est proposée. Réformer l’école de la première chance, refonder notre fiscalité, renouveler notre système de retraite et s’engager sur le vieillissement actif, un plan industriel, le droit au logement en particulier des jeunes… voilà des réformes génératrices de croissance et créatrices d’emplois, mais nenni faudrait du courage.
Je ne supporte plus le procès fait à celles et à ceux qui dénoncent l'actuelle répartition des richesses, ils seraient ainsi opposés à la création même de richesses. Bien sûr, pour partager la richesse, il faut d'abord la créer. Mais osons affirmer que s'il existe une armée immense de créateurs de richesses et en premier lieu les travailleurs, il existe aussi des fossoyeurs de richesses ! Et ces derniers mois nous voyons qu'ils ont le pouvoir de nous entrainer dans un cycle mortifère.
Il ne suffit plus de dénoncer les rentiers cupides et les pratiques malhonnêtes boursières ou financières, il faut aider nos dirigeants politiques à prendre le pouvoir sur les politiques économiques et monétaires, à mettre en place une démocratie économique comme existent la démocratie politique et la démocratie sociale. Ce n’est plus la Bastille ou l’Elysée qu’il faut prendre, c’est Bruxelles, Strasbourg et l’Europe toute entière qu’il faut prendre pour y installer un pouvoir fort, un pouvoir politique, économique et social. Contrairement à ce que j’entends, la mère des batailles ce n’est pas 2012 mais l’installation d’un véritable pouvoir européen. Ce n’est plus seulement la mise en place d’instances de régulation qu’il faut revendiquer, mais la prise du pouvoir démocratique sur ces instances.
Oui l'heure est à oser prendre politiquement le pouvoir économique pour mettre la main sur la richesse que nous produisons. Ce pouvoir est à exercer localement, nationalement et il devient dramatiquement urgent et impérieux aux niveaux continentaux et mondiaux.
Arrêtons de parler de gouvernance, gouvernons !
08:53 Publié dans solidarités | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : world forum lille
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