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11/09/2014

Jean Paul JACQUIER nous a fait la nique, une dernière fois

Quand d'autres syndicalistes cherchaient de fausses bonnes raisons à la crise du syndicalisme des années 80, Jean Paul JACQUIER, secrétaire national de la CFDT, décide d'expérimenter de nouvelles méthodes, de nouveaux outils pour retrouver une meilleure efficacité au service des salariés. Il est bien seul, à l'époque.

Son parti pris est de prendre le contre pieds radical des syndicalistes dits purs et durs, sûrs d'eux,incapables de remettre en cause leurs fondamentaux. Dans son livre, un peu délirant, "les cowboys ne meurent jamais", il propose un new deal syndical aussi décapant sur la forme que sur le fond.

J'ai adhéré rapidement au style JACQUIER, provocateur, irrévérencieux, décalé.. mais surtout basé sur l'expérimentation. Ainsi, l'autre jour avec Françoise BOUREL, nous nous rappelions l'épopée du premier Forum des Comités d'Entreprise. Jean Paul, considérant la bonne image des CE ( par ailleurs très décriés par ceux qui refusaient l'institutionnalisation du syndicalisme), décida de valoriser les actions innovantes menées par les élus, y compris les non syndiqués qui étaient majoritaires. Françoise était chargée de l'accueil, "le plus convivial possible" avait exigé JP, mais voilà qu'à l'heure dite, les visiteurs étaient rares et c'est la peur au ventre que nous regardions les stats d'entrée... Le premier Forum fut un succès.
Autre "innovation" de Jean Paul, l'analyse informatisée des accords négociés en entreprise. Cela paraît normal aujourd'hui, mais ce fut à l'époque une vraie révolution syndicale. Il n'était pas habituel de valoriser les acquis syndicaux, modestie oblige, le syndicaliste ne devait pas se mettre en avant, un bon syndicaliste devait se faire mal, Jean Paul raillait cette vision masochiste du militantisme. Il avait le syndicalisme joyeux, flamboyant.

Dans un papier hebdomadaire dans le journal officiel de la CFDT, intitulé "pingpong", JP clouait au pilori le gouvernement de Mitterrand, histoire d'enfoncer le clou sur l'indépendance syndical, ou sur les doubles discours patronaux ou syndicaux.

Même à la retraite, Jean Paul réalisa ce que la CFDT n'avait jamais pu ou voulu mettre en place, le site "les clés du social" véritable banque de données sur le social français mais aussi européen. Convaincu avant l'heure de l'efficacité des réseaux sociaux, Jean Paul réalisa ainsi la synthèse de l'œuvre de toute une vie.

Jean Paul JACQUIER est décédé au début de cet été, incapable d'écrire ce texte plus tôt, je garderai toujours le souvenir chaleureux de Jean Paul qui d'après sa femme me considérait comme son fils putatif, je suis fier d'avoir été l'ami de ce monument syndical.

02:21 Publié dans A lire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jp jacquier