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11/11/2019

Le « bon endroit » du Président

À RODEZ, le Président déclare solennellement : « Nous sommes en train de réinventer la grammaire du dialogue social...Il faut mettre les partenaires sociaux au bon endroit. » Cette évidence exprimée, pourquoi en appeler à la grammaire pour gommer la mise à l’écart progressive des partenaires sociaux au profit d’une démocratie directe avec des citoyens tirés au sort, ou comme à Rodez, avec des lecteurs de journaux régionaux.
C’est une vraie question, redondante, en France, Mais n’est-ce pas d’abord celle de l’Etat qui, lui, devrait se trouver et rester au bon endroit.

Disons le, la France est étatique, les corps intermédiaires n’y ont pas bonne presse. Même le leader du premier syndicat écrit dans un livre ne pas aimer ce mot lui préférant celui d’acteurs de transformation sociale -OK-.

Pourquoi cette soif d’Etat, jamais assouvie malgré DE GAULE et maintenant MACRON. Pourquoi les Jacobins dominent-ils toujours les Girondins ?

L’Histoire y répond. Les révolutionnaires de 1789 ne voulaient aucun intermédiaire entre l’Etat et le camarade Citoyen. Mort aux corporations, mutuelles, amicales et bien sûr religions, associations et syndicats étaient réprimés !

Il aura fallu un siècle pour obtenir les lois de 1884 sur les syndicats et le début du 20 ème siècle pour la loi 1901sur les associations. Dire que les rapports entre l’Etat et les religions ont été réglés par la loi de 1905 est, ces jours-ci, bien téméraire.

Oui, pendant un siècle, syndicats-associations et différemment les religions ont été interdits. Pendant ce siècle chape de plomb sur la démocratie sociale française, partout en Europe, le syndicalisme prospérait, notamment les trade-unions britanniques qui dominaient même les partis politiques. L’histoire du mouvement syndical, dans tous les autres pays européens, n’a pas connu pareille parenthèse. Après, nous nous étonnons, comme des vierges effarouchées, des comparaisons entre les taux de syndicalisation de l’Europe du Nord ou des pays anglo-saxons. Triste école de la République qui omet cette apprentissage historique.

Plus près de nous, à quelques mètres, en Belgique, les partis politiques laissent le champ du social aux partenaires sociaux. Au moment où MACRON s’accapare l’UNEDIC, les chômeurs belges vont chercher leurs indemnités chômage au local syndical. Pas questions d’y toucher, démocratie sociale et démocratie politique font bon ménage... enfin comme tous les ménages.

Pour en venir à cette extraordinaire réforme des retraites, il est désolant de se dire que nos concitoyens vont résumer les questions de gouvernance à une querelle d’intérêts quand il s’agit de redéfinir pour cinquante ans les rapports entre l’Etat et les organisations représentatives de ceux qui financent la répartition à savoir les salariés et les entreprises.

14/03/2016

Qui a peur du dialogue est toujours un faible

La loi EL KHOMRI illustre combien il est difficile, pour les réformistes, de faire vivre le dialogue social. Source de performance économique et sociale, le dialogue social est malheureusement sans cesse pris en otage par les forces belliqueuses ou autoritaires de notre société.

Les détracteurs du dialogue social ont toujours « peur ». Peur de se faire instrumentaliser, peur de s’engager, peur du niveau entreprise et même peur de demander l’avis des salariés.

Le débat sur le référendum social en est l’illustration. En 2014, il y a eu 11 453 accords ratifiés par référendum mais personne ne le sait. Ce sont ceux qui demandent l’extension du droit d’expression des salariés qui leur refusent le droit de valider ou d’invalider un accord engageant leur quotidien. Bien sûr, ce vote doit être encadré, organisé par des syndicats représentants au moins 30% des salariés est une garantie largement suffisante. Le réformiste sait que l’on ne peut pas réformer la société sans la société, débloquer la société c’est libérer sa parole et lui donner le droit d’exprimer son avis quand le débat institutionnel s’enlise. Je parle ici du référendum local, je suis très réticent au référendum national où il faut répondre par oui ou par non à une question complexe.

Certains s’étonnent que les syndicats soient divisés, mais la rupture est historique ! Faut-il le rappeler, la CGT dit défendre les chômeurs et n’a jamais signé un accord sur l’indemnisation du chômage. Le dernier accord qui a sauvé les régimes de retraite complémentaire n’a pas été signé par FO et la CGT! Le pôle réformiste CFDT-CFTC-CGC est en France le pôle majoritaire du syndicalisme mais c’est aussi le pôle ignoré des médias qui préfèrent filmer des pneus qui brulent qu’une table de négociation. Personne n’imagine le stress vécu par le syndicaliste au moment d’engager sa signature, je peux vous assurer qu’il en faut du courage.

Le patronat préfère quémander aux élus politiques, plusieurs fois par jour, des baisses de charges ou des subventions et considère le dialogue comme une contrainte. Le Président du Conseil Régional serait bienvenu de conditionner toute aide financière à une obligation de dialogue territorial. Je connais des syndicalistes demandeurs de ce dialogue social territorial, les employeurs en parlent mais en ont peur.

Les étudiants réformistes existent, ils sont même plus représentatifs que l’UNEF. La FAGE est l’organisation majoritaire de la jeunesse, elle représente 300 000 jeunes épris de citoyenneté et d’ouverture. La jeunesse ne se résume plus à l’UNEF.

Article paru dans Autrement Dit

23/01/2015

Réforme du dialogue social, place à la loi

Syndicats de salariés et employeurs ont échoué dans leur tentative de se mettre d'accord sur la modernisation du dialogue social.

Si les syndicats CGT et FO ont rapidement fait connaître leur désaccord, les 3 autres confédérations ( CFDT, CFTC,CGC) ont tenté de trouver un compromis avec le patronat jusqu'à la dernière minute, même si la CGPME avait décroché sur les dernières propositions du MEDEF et de l'UPA.

Si une majorité d'organisations pouvaient se retrouver pour considérer nécessaire de moderniser les règles actuelles du dialogue social, leur simplification et l'extension à l'ensemble des entreprises, la réforme exigeait la capacité à inventer un nouveau système gagnant gagnant, sur lequel les négociateurs ont achoppé.

Voici les 4 enjeux majeurs de cette négociation.

1- le droit pour tout salarié d'être représenté par un élu. Ce droit existe pour les grandes entreprises mais pose problème dans les petites et très petites. Les dernières propositions prévoyaient une représentation extérieure aux entreprises pour les PME. Les salariés auraient élus 10 représentants pour une commission territoriale de dialogue social siégeant à l'extérieur de l'entreprise. Malheureusement cette commission n'avait semble t'il peu ou pas de prérogatives, ce que les syndicats ne pouvaient accepter.
Je me rappelle avoir été étudier en Italie ce type de représentation..il y a plus de 20 ans!

2- un conseil d'entreprise unique remplaçant à la fois les délégués du personnel, les comités d'entreprise et même les chsct. Le patronat avait réussi à convaincre les 3 syndicats réformistes à envisager ce tremblement de terre. Il semble que les syndicats n'ont pas été entendus pour obtenir les moyens nécessaires au bon fonctionnement de cette méga-instance.
C'est dommage car à l'évidence pour les DP, il fallait revoir l'empilement des institutions représentatives du personnel.

3- la simplification des procédures d'information et de consultation obligatoires nécessitait aussi d'être examinée. Malheureusement, le patronat, qui avait là, l'occasion d'obtenir satisfaction a encore une fois été trop gourmand.

4- les moyens des élus du personnel sont en France très en deçà de ce qui est octroyé dans les autres pays socialement civilisés. Leur amélioration exigeait bien sûr quelques garanties pour éviter des droits opportunistes, les syndicats connaissent ces pratiques, ils étaient prêts à y remédier, là aussi le compromis n'a pas été trouvé.

Maintenant, les partenaires n'ont plus la main. Le gouvernement et les élus vont décider. Et tout le monde sera enfin d'accord pour s'opposer aux nouvelles réglementations décidées par d'autres.