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02/10/2020

Ne jugez pas ces syndicalistes souvent en premières lignes

En voyant les images du drame humain, social, économique de Bridgestone, comment ne pas se remémorer les heures noires de la désindustrialisation du textile, de l’acier et du charbon que nous avons connues dans les années 70 et 80. Ça continue. Les mêmes images de visages ravagés, sidérés... cette solidarité qui monte naturellement, la tristesse ou la colère qui vous envahit.. et ce sentiment insupportable d’impuissance.

C’est le lot de la classe ouvrière depuis les canuts. Ce cumul inacceptable d’injustices, d’inégalités, d’exploitations, pour un labeur devenu brutalement inutile.

Pour avoir été à Denain avec les émeutiers d’Usinor, à Haisnes lez la Bassée avec les couturières de la CIP, auprès d’autres combats perdus d’avance mais qu’il fallait mener, la tête haute, parce qu’un syndicaliste n’a pas le droit de laisser, comme d’autres, sur le carreau des femmes et des hommes jetés hors du travail. Dans ces moments là, le syndicaliste fait front avec les moyens du bord.

Cela paraît dérisoire d’appeler les politiques pour promettre l’impossible, de brûler des pneus pour se rappeler aux journalistes, de lancer des procédures juridiques de retardement, puis de négocier un plan social, et à la fin, dans l’anonymat le plus total, animer des cellules de reclassement... vous pouvez critiquer ces syndicalistes, mais vous que feriez vous?

Alors oui, toutes les stratégies syndicales ne se valent pas. Nous aimerions d’ailleurs voir discerner, sur les plateaux de télévision et la une des grands quotidiens, chaque mois, le meilleur accord collectif négocié entre un chef d’entreprise et les syndicats, ceci afin de rééquilibrer le droit d’expression entre syndicalisme de propositions et de contestation. Pour être écouter aujourd’hui, un syndicaliste a t’il une autre solution que la violence pour s’opposer à la violence sociale? Cette question hantera longtemps les réunions syndicales.

Pour revenir à Bridgestone, comment ne pas dénoncer cinq années et plus de non investissements, ou se rappeler les choix européens de soutenir l’usine polonaise et ce référendum où 60% des salariés ont refusé un accord dit de « performance » collective qui proposait une augmentation non compensée du temps de travail, une limitation des hausses de salaire et la suppression d’une équipe de travail. Le sort de l’usine de Bethune ne s’est pas joué ces derniers jours mais bien avant. Que penser, en ces instants, des mauvaises ordonnances sociales qui ont limité le droit aux expertises économiques permettant aux syndicalistes de pointer les décisions en préparation dans les comités de direction? Et aujourd’hui la ministre qui est obligée de proposer aux syndicats le financement d’une contre-expertise, oui, ce gouvernement a fait de lourdes erreurs en terme de dialogue social et nous le payons cher.

Dans cette chronique socialement responsable, nous n’avons malheureusement rien à proposer. Sinon respecter et soutenir celles et ceux qui en ce moment cherchent à sauver, si pas les emplois, la dignité des ouvriers.

Les salariés et les syndicalistes sont dos au mur et c’est la position qu’ils ne souhaitent à personne.

10:00 Publié dans Actualités | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : emploi

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