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09/06/2013

Pierre MAUROY est décédé

Dire qu’il m’impressionnait c’est peu dire. Nous n’étions pas très proches, j’ai cependant gardé de grands souvenirs de nos rares rencontres.

Voici quelques retours sur ces grands moments.

Un jour Bernard ROMAN avec qui je dissertais souvent sur la social-démocratie, a organisé un déjeuner en mairie de LILLE. Intimidé devant ce regard bienveillant, je fus surpris par son écoute active, exceptionnelle pour un dirigeant politique, il m’écoutait et me parlait pour me faire approfondir le propos. Il me demanda de lui brosser un tableau sur l’état du syndicalisme, il montra une inquiétude palpable quand j’abordais le risque – nouveau- du populisme syndical avec BLONDEL et MARCHELLI. Arrivé à 12h30, je repartis après 15h !


Je me souviens aussi de cet instant où je lui présentais la courbe de la chute des adhérents de la cfdt, avec des pertes de 13% pour les années 82,83 et suivantes. Il ne comprenait pas. Il restait interrogatif sur l’appel syndical à voter Miterrand. Il disait avoir reçu, à Matignon, des centaines de lettres de syndicalistes lui demandant de régler un tas de problèmes, il était conscient de la surestimation de l’action gouvernementale par les syndicats.

Nous avons aussi parlé de la politique de rigueur qu’il avait du défendre. Il se montrait inquiet des propos démagogiques, de l’irresponsabilité gauchiste. Ce grand social-démocrate expliquait très simplement qu’un dirigeant devait être capable de demander des efforts, de proposer des réformes difficiles pour des résultats qui ne pouvaient être immédiats. Je m’en souvenais quelques années plus tard quand Gerhart Schröder nous disait la même chose en parlant des retraites.

Ce très mauvais souvenir de la manifestation à Usinor Denain où il fut insupportablement hué par le maire de Denain, la CGT et une foule de militants dits de gauche.

Ce rêve olympique de la candidature de Lille où il me choisit comme le seul syndicaliste dans le CA de l’association porteuse du projet.

Enfin comment ne pas parler de ce soir du congrès Léo Lagrange à Armentières où j’étais assis à ses cotés à la tribune. Il revenait épuisé du congrès de Rennes, il me demanda en souriant « tu sais pourquoi on nous appelle les éléphants ? », devant ma perplexité, il répondit « parce qu’il faut avoir la peau épaisse ». Tout était dit de ce qu’il avait du supporter.

Et dire que plus jamais, nous ne pourrons entendre ses discours si imagés, si forts, cette conviction contagieuse, et ce plaisir de nous lever comme un seul homme et de l’applaudir longuement.

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