01/05/2012
Bonne fête du travail
Voici une tribune faite pour le journal la croix du nord
Ce 1er mai 2012, coincé entre les deux tours des élections présidentielles, est très particulier. C’est pour nous militants syndicaux de toute obédience, l’occasion de rappeler quelques fondamentaux de notre République.
Contrairement à certaines déclarations récentes, il existe entre l’Etat et le citoyen une société faite de femmes et d’hommes libres et responsables. Ces femmes et ces hommes se sont, aussi, constitués en associations, mutuelles, syndicats… ce que l’on appelle les corps intermédiaires. Ils font vivre la démocratie sociale, ils négocient des conventions collectives, médicales, etc. La démocratie sociale génère de nombreux droits, avantages, réglementations (droits sociaux, familiaux, logement, santé ….)
Je rappelle que c’est suite à la révolution française (et ce, contrairement à tous les autres pays) que la loi Lechapellier, en 1791, interdit toute association intermédiaire entre l’Etat et le
citoyen. Il faudra un siècle de luttes (1884) pour que cette loi liberticide soit abrogée. Les révolutionnaires considéraient que seul comptait l’intérêt général, que les intérêts particuliers devaient être bannis ! La démocratie ne pouvait être que politique. Pour eux la démocratie sociale était une hérésie. Personnellement, je n’ai jamais opposé intérêt général et intérêt particulier, c’est même un des fondements de mon engagement.
Les 1ers mai relèvent de cette histoire où seules pouvaient être commémorées les fêtes patriotiques et … chrétiennes. Point de fête du travail, car à leurs yeux, les travailleurs organisés n’existaient pas, et si c’était le cas, ils devaient être combattus. Combattus au prix de la vie humaine.
Une histoire sanglante qui est la notre.
En mai 1886, à Chicago, les syndicats américains (et oui !) organisent une énorme journée de protestations pour la journée de 8 heures. 340000 grévistes dans 12000 usines, bilan 12 morts dont cinq policiers.
1889, le congrès de l’internationale socialiste décide de faire du 1er mai une journée mondiale du travail.
1891, à Fourmies, l’armée tire à bouts portants sur la foule pacifique des ouvriers, dix morts dont huit jeunes.
1941 et 1947, le 1er mai devient une fête légale, un jour férié et chômé
Historiquement, le 1er mai est lié à la lutte pour diminuer le temps de travail (1886 les 8 heures, 1926 les congés payés, 1936 les 40 heures, 1982 les 35 heures)
Et 2012 ?
Les problèmes sociaux sont légions. Chômage de masse, surtout pour les jeunes, plus de 10% de taux de pauvreté, pénurie de logements sociaux, difficultés d’accès aux soins médicaux pour de plus en plus de nos concitoyens… la liste est bien trop longue pour la cinquième puissance économique du monde.
D’un autre coté, les inégalités sociales explosent, 34% d’augmentations pour les patrons du CAC40 et à peine 2% pour les salariés, une fiscalité qui continue à privilégier les revenus financiers et assomme les revenus du travail …
C’est dans ce contexte où l’exaspération des peurs et des angoisses engendre intolérance, exclusion, racisme que nous vivons ce 1er mai 2012.
Nos syndicats, tous nos syndicats, sont fidèles aux grandes valeurs qui leur sont communes : exigence d’émancipation, de solidarité, de responsabilité des individus et des groupes, refus des inégalités dans le respect des différences. Voilà des valeurs très fortes, pour lesquelles ça vaut le coup de s’investir, de militer, d’adhérer. Notre problème, à nous syndicalistes, est d’exprimer ces valeurs à propos des réalités d’aujourd’hui. Ce n’est pas seulement un message du cœur que nous avons à délivrer, nous avons à traduire ces valeurs devenues universelles, en objectifs revendicatifs et de transformation sociale et c’est bien là notre difficulté.
Le syndicalisme est décrié, à juste titre quand certains l’utilisent pour se planquer et défendre leur propres intérêts, je les dénonce avec la plus grande sévérité, j’espère qu’avec les nouvelles règles de représentativité, ils ne seront plus réélus. Mais l’immense majorité des syndicalistes sont des femmes et des hommes intègres, généreux qui ne ménagent pas leur temps pour défendre les autres. C’est à eux que je veux dire : tenez bons, imaginez ce que ce serait si vous n’étiez pas là, que le syndicat n’existait pas. Je dis la même chose aux employeurs, aux DRH, que feriez-vous sans nous, avec qui négocierez vous les négociations obligatoires, les changements indispensables dans les process de travail ?
Bonne fête à vous lecteurs, que vous soyez demandeur d’emploi, salarié, retraité, ne perdez pas confiance en vous, en nos institutions. Nous avons tous une part de responsabilité à prendre, par notre vote mais pas seulement, pour vivre mieux, pour combattre l’individualisme et faire respecter la dignité humaine que l’on soit ouvrier, cadre, français ou étranger
00:22 Publié dans syndicats | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : 1er mai
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